Le dernier cadeau

Tout ce temps perdu pour m’en rendre compte…

Je me sens dupée !

En cet après midi d’été, l’évidence m’apparaît, mon cœur en est broyé. Il a suffit de ton éclat de rire, de quelques mots, pour que je sente soudain cette douleur.

J’ai réalisé. Il m’a fallu 4 ans.

Notre amitié autour d’un café était les plus beaux moments partagés. Je te les offrais, le café, l’amitié. Tu partais pressé.

Tu m’inspirais, alors je t’écrivais. De nos discussions naissaient de petites histoires, des nouvelles dont souvent tu étais le héros. Je te les offrais. Tu les parcourais.

Tu m’appelais en pleurant, la mort au ventre je trouvais les paroles qui soudain te faisaient sourire. Tu raccrochais.

Tu râlais contre la terre entière qui ne t’apportait pas assez d’amour. Je te donnais plus que je ne pouvais, serrant ta main je tremblais de ne pas te savoir aimé. Tu tapais du poing en serrant les dents. Les tasses à café en tremblent encore .

Tu ouvrais en te moquant les paquets d’anniversaire. je te les confectionnais avec soin et imagination. Tu les oubliais dans le café à coté de moi.

Tes photos me montraient mes cadeaux brisés, un bracelet déchiré. Je suffoquais. Tu t’expliquais, tu t’excusais, j’avais mal interprété. Probablement…

J’aime tant les livres, les mots, je te les offrais sans compter. Non seulement tu ne les ouvrais pas, mais tu ne les respectais pas.

Ce que tu n’as jamais compris, c’est que c’est toute mon âme dans ces feuillets que tu froissais. Il m’a fallu du temps pour ressentir la douleur et savoir l’interpréter.

Et puis il a fallu  cette nouvelle photo. Tu es au premier plan avec ton chien, en arrière plan sous le pied de la table mon dernier cadeau. Le dernier livre que j’ai aimé, je l’avais surligné, commenté pour toi.

Aujourd’hui c’est ton anniversaire, je t’écris une fois de plus, mon paquet est prêt. Est-ce que je dois le poster ? Est-ce que je dois le signer ? Des enveloppes qui présentent mon essence, mon sud que tu dénigres. De la lavande, du thym, du romarin, tous les parfums qui m’entourent. Je sais que tu attends mon colis comme tous les ans. Cette fois c’est différent. Derrière les enveloppes tu trouveras une petite boite.

Dans celle-ci tu y trouveras une cigale. Oui, une cigale, ce symbole d’une vie éphémère que j’ai ramassée dans mon jardin. Elle avait fini de chanter. J’ai fini de t’aimer.

Tu vas la balancer je le sais d’un air de dégoût. Tu ne comprendras pas que je t’envoie :

–         « un cadavre d’insecte ! elle est folle, complètement, c’est écœurant, c’est pas un cadeau çà… ».

J’ai l’impression de t’entendre, je te visualise exactement avec un air de mépris, je comprends tout clairement maintenant.  Ce cadavre c’est le mien. Je me suis vidée à t’offrir le meilleur de moi-même, mes meilleurs mots depuis tous ces étés. Mais je crois que mon chant t’agaçait. Maintenant je le sais. Rien ne sert de pleurer. Je suis juste brisée.

Plus de don et de toutes les façons il n’y a jamais eu de contre don

Voilà, maintenant je roule fenêtres ouvertes, décoiffée, pas maquillée, pas pleurer… Je ne porte plus rien qui m’attache, le seul cadeau que j’octroie c’est à moi, et c’est ma liberté.

Je n’ai plus d’alliances, plus de bijoux, plus de signe distinctif à part ma peau et mon sourire. Ce sont les seules choses que j’offrirai désormais, mais pas pour toi.

Tout ce que je t’ai donné sans compter. Mais tu m’as brisée.

Je t’ai offert mon amitié, mon cœur, ma sincérité, des livres, des parfums, des bouts de mots, des cahiers entiers où tu étais mon héros, du café, des bijoux, des éclats de rire quand tu pleurais, des chansons pour te faire rire, des baisers pour te rassurer,

Non, pour toi c’est fini, c’était ton dernier cadeau.

Mon cadavre de cigale.


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